mardi 8 février 2011

Nancy Spero


Légende photo:
Female Bomb, 1966
© Collection of Barbara Lee, Cambridge, Massachusetts, United States, source Centre Pompidou
Nancy Spero (1926-2009)

Du 13 octobre 2010 - 10 janvier 2011 au Centre Pompidou de Paris.



Spero défendait les droits de la femme et surtout des artistes féminines.
En 1966, elle délaisse la peinture, représentée en grande partie par des hommes, pour se consacrer à un travail plus graphique et revendicateur.
La rétrospective de cette artiste américaine se distingue de « elles@centrepompidou »1 mais les deux expositions se complètent, toutes deux étant au même étage.
Ce choix peu anodin met l'accent sur une réalité, et pas seulement dans le monde de l'art. Aujourd'hui, les femmes sont-elles autant représentées que les hommes? On parle beaucoup de parité, mais est-ce en application?

Un parcours en trois salles nous montre les œuvres de Nancy Spero par périodes d'influences.
La série War Paintings montre la guerre du Viêt-Nam et ses images qui l'ont choquée. Pour elle cette guerre est obscène, c'est pourquoi les armes sont souvent symbolisées par des pénis, elle assemble sexe et haine.

C'est en lisant Antonin Artaud2 que Spero, qui se reconnait dans sa fureur et dans sa frustration, s'est inventée femme-artiste et son œuvre sera dorénavant radicalement féministe. Elle lui consacre deux séries : les Artaud Paintings et Codex Artaud. En frise, des mots, des citations se marient à des figures, dessinées de profil (pour rappeler l'Egypte et l'Antique).

Au sein du groupe Women Artists in Revolution, elle façonne son œuvre autour de l'humanité au féminin. Elle libère la femme par son écriture graphique et ses formes, sans tomber dans le féminisme "facile"3, elle opère sur des fronts tant politiques que sociaux, écrivant même un Feminist Manifesto.
Un espace vidéo et photo nous montre une femme touchante, à la fois mère et artiste engagée. Elle fréquentait Louise Bourgeois qui, comme elle, a reçu une reconnaissance tardive. En 2006, Spero devient membre de l’académie américaine des Arts et des Lettres, enfin de la considération! Mais pas seulement pour elle, pour toutes les femmes artistes.
Le combat de Spero n'est pas pour autant terminé. Même depuis les années 70, les artistes féminines restent sous-représentées. Mais cette exposition aura eu le mérite de réactualiser la question de la représentativité de la femme dans le monde de l'art actuel.
                          
                                                                                                                 AxelleR.
texte paru dans le magazine Transversalles (mi-décembre 2010, mi-janvier 2011)

1 Exposition consacrée aux artistes féminines du début du XXème siècle à nos jours (accrochage jusqu'au 21 février 2011).
2Il est entre autre l'auteur du Théâtre et son Double , où apparait le terme de « Théâtre de la cruauté ». Notons que tout au long de sa carrière il sera proche des surréalistes, les approuvant puis les rejetant.
3Nous entendons par facile un discours anti-masculin, sans autre revendications que l'éloge de la femme et la dévalorisation de l'homme. Elle s'opposera d'ailleur aux féministes dites « Theory Girls » et à leur conception d’une figure féminine qui serait « dénuée de subjectivité ».

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