mardi 8 février 2011

Reflections of a world

Alexey Alexeev, extrait de la série Mirrorland - Ambrotype sur verre au colodion, 30 x 40 cm
Du 5 novembre 2010 au 7 janvier 2011, la galerie Stimultania accueille les travaux de deux photographes russes.
Dmitry Rubinshteyn et Alexey Alexeev travaillent avec une technique séculaire, celle de l'ambrotype, inventée dans les années 1850. Ce procédé consiste à obtenir une image qui sera unique sur une plaque de verre à l'aide de collodion humide. Par là les artistes ancrent des modèles et paysages contemporains dans un temps historique révolu, celui de l'avènement de la photographie en noir et blanc.
Photographiés en Finlande par Dmitry Rubinshteyn, les paysages vides semblent figés et nous glacent le sang. Une seule silhouette fait son apparition, celle d'une femme-fantôme qui se fond dans les arbres, apparaît, disparaît, comme soumise aux lois d'une nature qui la dévore. La galerie Stimultania a brillamment réussi le pari d'exposer ces œuvres de petites dimensions (20 x 25 cm) à l'aide d'une scénographie épurée.
Alexey Alexeev propose une série intitulée Mirrorland directement inspirée de l'histoire d'Alice au pays des merveilles de Lewis-Caroll. Stimultania a opté pour une mise en abime : un pièce close et sombre se trouve au centre de la galerie et c'est en son sein que l'on retrouve l'effrayante série qui présente un monde fantomatique. On y rencontre des personnages pourvus des attributs des protagonistes du livre. Ces êtres étranges se confrontent, tantôt à des échelles différentes, tantôt en miroir et donnent l'impression que l'on pénètre dans une foire à monstres. Le photographe a placé des images des modèles au naturel à l'extérieur de la pièce, et c'est par cette opposition qu'il entend questionner la folie contenue en chacun de nous. Lui par contre est déguisé et se place dans la position d'un bateleur qui amènerait le spectateur à voir sa galerie de monstres de l'autre côté du miroir.
A l'aide d'une technique désuète, les artistes mettent en évidence ce paradoxe photographique entre l'unicité d'un moment capturé dans la réalité et le caractère infini d'un monde merveilleux. Comme le disait si justement Baudrillard : « comme la mort, la photographie fixe la fin du réel ».

Texte publié dans le magazine Transversalles (mi-décembre 2010, mi-janvier 2011)

                                                                                                               Marion Hulot

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